Kassaman binnazilat ilmahiqat..." le plus noir des crimes est celui qui consiste à obscurcir la conscience politique et d’égarer tout un peuple" d'Emile ZOLA

Kassaman binnazilat ilmahiqat..." le plus noir des crimes est celui qui consiste à obscurcir la conscience politique et d’égarer tout un peuple" d'Emile ZOLA

Le nom de ce blog est sans doute évocateur de notre "nachid el watani" tant décrié par le passé parce que, associé au pouvoir Algérien illégitime. Après des décennies de disettes. Je voudrais faire de cet espace, un coin où tous mes compatriotes et autres amoureux de libertés, de démocratie, ou tout simplement d'histoire pourraient s'exprimer librement. En ce sens, nous vous souhaitons la bienvenue. En hommage à Nacer Hachiche, repose en paix et à bientôt ! Pour garder le contact avec notre chère patrie : http://www.alger-presse.com/index.php/presse-fr


Y a t-il un mal Algérien ? Par Brahim SENOUCI

Publié par The Algerian Speaker sur 21 Mai 2016, 16:46pm

Y a t-il un mal Algérien ? Par Brahim SENOUCI

Oui, à l’évidence. Il se manifeste de différentes manières. Il y a la violence quotidienne, dans le trafic automobile, dans les stades, les urgences des hôpitaux, le huis clos familial… Il y a eu aussi, surtout, le déferlement de haine des années 90 qui s’est soldé par la mort, dans des conditions souvent atroces, de plusieurs dizaines de milliers de nos compatriotes.
Nous ne connaissons pas les racines de cette violence. Cette méconnaissance nous conduit à penser, inconsciemment, qu’elle nous est peut-être consubstantielle. C’est sans doute une des raisons pour lesquelles nous cultivons « le vouloir ne pas savoir », l’autre nom du refoulement, de peur que des fantômes nous sautent à la figure si nous nous avisions de nous hasarder à une introspection trop profonde.
En Algérie, les débats tournent très souvent court. Se rendre au point de vue d’un contradicteur est presque impossible, chacun voulant préserver le refuge que constitue une position définitive, à défendre coûte que coûte. La nuance est quasiment inconnue et l’autocritique absente…
C’est ainsi que l’Algérie est intellectuellement figée et que la société s’emploie quotidiennement à veiller au maintien d’un ordre des choses qui, s’il n’est porteur d’aucune promesse, est réputé nous sauvegarder de nous-mêmes. En même temps, nous nous en voulons de notre apathie, de notre conservatisme étriqué, de nos petitesses. Nous exprimons notre frustration en accusant les autres, toujours les autres, en nous livrant à notre jeu de massacre favori qui consiste à agonir le pays, l’Etat, le gouvernement, la société d’injures.
Un concept a été proposé par le psychiatre M. J. Lerner il y un demi-siècle, la CMJ, ou Croyance en un Monde Juste. Le sujet est trop vaste pour être épuisé ici mais on peut en donner un bref aperçu. La CMJ consiste, au nom du postulat que le monde est nécessairement juste, à considérer que « les gens obtiennent ce qu’ils méritent et méritent ce qu’ils obtiennent », à estimer que les événements positifs arrivent aux gens bien et les événements négatifs aux gens mauvais. Avant Lerner, Myrdal remarquait en 1944 que l’on « justifiait souvent le traitement des groupes oppressés en clamant qu’ils ont mérité leur destin » et Goffman relève que, inconsciemment, l’infirmité physique est considérée comme une preuve d’imperfection morale, ou la sanction d’une faute commise par la victime ou ses ascendants. Lerner notait, sans surprise, que la pertinence de sa théorie était directement liée à la religiosité de la société concernée.
L’Algérie lui offre à l’évidence un cadre parfait. Cela fait bientôt deux siècles que notre peuple est sorti de l’Histoire, subissant après la longue période de soumission à un ordre colonial qui lui déniait toute existence, une dictature imbécile, le massacre de masse de la décennie noire, et le marasme actuel. Nous sommes sans doute tentés de croire, comme l’affirme Lerner, qu’une telle succession d’épreuves ne peut être fortuite et qu’elle doit avoir une justification obscure. Peu d’Algériens sont indemnes de cette logique mortifère. Chaque génération s’emploie, par ses silences et ses explosions de violence, à transmettre ce flambeau sinistre, en même temps que la recommandation tacite de ne pas chercher à en percer le mystère originel. Voici un terreau parfait pour le développement de la haine de soi, avec ses corollaires, la tentation du suicide altruiste, la défiance, voire la haine, à l’égard des compatriotes, miroirs renvoyant l’image dévalorisée de chacun. « Dis-moi qui tu fréquentes, je te dirai qui tu hais », pourrait être la version algérienne du proverbe bien connu. Il est fréquent, à l’annonce d’une catastrophe, tremblement de terre ou inondations, d’entendre des Algériens regretter à voix haute que cette catastrophe ne se soit pas produite en Algérie ! La CMJ est aussi un moyen commode de s’affranchir de l’obligation très terrestre de travailler pour améliorer sa condition, son environnement, peser sur les choix politiques des gouvernements successifs, garder un état de veille citoyenne permanent et dénoncer sans relâche les dérives mafieuses dont le Pouvoir est le théâtre. Un élément qui peut paraître anecdotique : dans tous les pays du monde, après les résultats du baccalauréat, les jeunes diplômés tentent de s’inscrire dans des filières susceptibles de les conduire vers les métiers dont ils rêvent. Il n’est pas question pour un aspirant océanographe de s’inscrire dans une école d’électronique, ni pour un danseur en puissance de postuler pour le grade d’ingénieur. Pas en Algérie… La carrière de nos jeunes bacheliers est déterminée par leurs notes au fameux examen. Si elles leur permettent de suivre des études d’architecture ou de médecine, ils seront contraints de s’engager dans ces filières. S’ils avaient des velléités de s’y soustraire, la pression familiale serait telle qu’elle ferait taire leurs rêves. C’est ainsi que, dès l’entrée dans l’âge adulte, nos jeunes gens sont dessaisis du droit de choisir leur destin. Rien d’étonnant à ce que leur ardeur au travail soit à l’image de leur « prédilection » pour un métier qui leur aura été imposé…
C’est avec ce système fondé sur une déresponsabilisation générale qu’il convient de rompre. Il y a encore de la place pour un discours appelant à cette rupture, à la fin du primat de la fatalité, à l’accès à une citoyenneté responsable. Il nous faut rouvrir le champ des possibles, le goût de la découverte, l’ardente obligation de vivre et de créer. Autrement, telles des ombres furtives, nous nous effacerons de la mémoire du monde et nous risquons de disparaître dans l’indifférence générale…

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N
,A Alger, la moindre parcelle de terre est détournée pour la construction de cités ou d'habitations individuelles. Dans ce contexte, les jeunes complètement désœuvré, par l'absence d’espaces et de loisirs et face au vide et à l’oisiveté; ils recourent aux méthodes extrêmes.<br /> Le pouvoir se justifie de par l'ampleur de la crise du logement, quitte à raser des forets et de dilapider des terres à haut rendement agricole.<br /> Dans ce contexte, les années qui viennent semblent être très difficiles pour le peuple Algérien et le mal qui s'est enraciné en nous deviendra banal. Les autres nations, dans leurs discussions, au lieu de prononcer le mot "mal", diront tout simplement Algérien.
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